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Acte I - Il ne souvient pas de leurs visages, seulement de la lune, drapée de sang. Des ombres se mouvant dans l'obscurité, presque invisibles. Lames pourfendant l'air et venant s'enfoncer dans la chair, la danse ne dura qu'un temps et le calme retomba rapidement dans la vallée. La pâle sphère qui régnait dans les cieux atteignait son plus haut sommet, les corbeaux s'envolaient vers les montagnes qui se situaient au loin dans le paysage. Le jeune garçon dont le visage mordait la poussière utilisa ses dernières forces pour se hisser sur ses maigres guiboles. Il était si fin, les joues creusées et la peau marquée. A mesure que ses chimères se rapprochaient, ses jambes semblables à des cannes peinaient à le maintenir debout, était-ce lié à la peur qui pouvait le saisir à tout instant ou le funeste sort que lui réservait la carence alimentaire qui le rongeait depuis bien longtemps. Sa vision arrivait par moment à percevoir les ombres ondulant de part et d'autre, les lignes se déformaient, épousant les formes en mouvement.

Acte II - Les voix, au début de simples murmures brisant le silence, devenaient de plus en plus perçantes. Il avançait, seul dans ce long couloir, torches éteintes. Des vibrations émanaient du plafond, et s'intensifiaient au fur et à mesure que la silhouette progressait. Lorsqu'il franchissait le deuxième jalon, il pouvait distinguer le son d'une foule acclamant des noms. La lumière, il pouvait maintenant la voir d'où il était, était braquée sur la sortie du tunnel, comme si elle attendait que quelque chose en sorte. La démarche toujours si sereine et austère, il ne prêtait maintenant plus attention aux exclamations qui venaient percuter de plein fouet ses tympans, devenant des bruits de fond dans son esprit. Le troisième jalon, une assemblée en délire formait un arc de cercle épousant la forme ronde de l'immense pièce dans laquelle elle se trouvait. Face à elle se trouvait un dôme sur lequel étaient confortablement installés un petit comité, attendant calmement le début du spectacle. Certains semblaient s'impatienter depuis un bon moment, accoudés à leur trône, des regards inquisiteurs pour certains, tyranniques pour d'autres, d'autres ne laissaient paraitre aucune émotion, préférant analyser chaque acte qui composait la scène. La silhouette se révéla aux projecteurs, un jeune homme à la longue chevelure aussi sombre que la mine qu'il affichait. Des cicatrices entrelaçaient son corps, du buste aux épaules, des épaules aux mains et au cou. Des marques noires enroulaient son bras gauche, il s'arrêta un moment pour les contempler. Ces courbes lui rappelait au combien sa vie était futile, qu'elle ne lui serait jamais propre et qu'il n'était pas libre. Il lui appartenait, il avait payé le prix fort pour pouvoir lui apposer des chaines à ses poignées et ses chevilles. Comment pouvait-on déceler un tel potentiel chez un être aussi naissant, à travers ses yeux injectés de sang il l'avait aperçu, le démon qui consumait son âme.

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